Décryptage
Par Amélie Petitdemange, publié le 02 avril 2024
6 min
L’Anestaps et le mouvement « Staps oubliés » dénoncent des frais cachés pour les étudiants en STAPS. Certaines pratiques sportives nécessitent d’acheter du matériel ou de se déplacer, à la charge des étudiants.
Dans un contexte de précarité étudiante et d’inflation, les étudiants en STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives) doivent débourser des sommes supplémentaires afin de suivre leurs cours.
Ces dépenses liées aux enseignements spécifiques à la filière, notamment avec l’achat obligatoire des équipements nécessaires à la pratique, sont dénoncées par l’ANESTAPS (Association nationale des étudiants en STAPS).
À la rentrée 2023, 13,7% du coût total de la rentrée en STAPS est consacré à l’achat des équipements sportifs, selon leur dernière étude. « Le matériel sportif représente le deuxième poste de dépense d’un étudiant après le loyer, une somme non négligeable (391,21 euros) concernant uniquement les étudiants en STAPS », souligne l’enquête.
Un coût qui est par ailleurs en hausse avec l’inflation. Ces dépenses ont augmenté de près de 25% entre l’étude de 2023 et celle de l’année passée.
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Acheter du matériel pour six sports différents en première année de STAPS
Ces frais concernent notamment le matériel nécessaire à la pratique sportive : raquettes de badminton, gants de boxe, crampons de foot, kimono… La liste varie selon les étudiants, mais reste longue.
« En première année de STAPS, les étudiants pratiquent au minimum six sports différents. Ils doivent à chaque fois acheter du matériel, que bien souvent ils ne réutiliseront pas ! », souligne Lily Rogier, présidente de l’ANESTAPS.
Gabi, en licence 3 de STAPS à l’université Clermont Auvergne, a rencontré cette problématique. « La première année est celle qui m’a coutée le plus cher, car j’ai pratiqué six sports, et il n’y a aucun prêt de matériel. Pour des matières comme l’athlétisme, ça va, mais par exemple en badminton, la raquette coûte cher », explique-t-il.
Résultat : « certains étudiants ne prennent pas le sport qui les intéresse, car le matériel est trop cher », ajoute-t-elle.
C’est le cas d’Emma, en master 1 de STAPS à l’université des Antilles (Guadeloupe). « J’aurais aimé pratiquer le paddle, mais ça coûte beaucoup trop cher. Que ce soit à acheter ou à louer, je ne peux pas me procurer un paddle et des pagaies », explique-t-elle. Si l’université prête le paddle dans le cadre du cours, ne pas avoir son propre matériel empêche de s’entrainer sur son temps libre.
Dans la majorité des disciplines, le matériel est entièrement à la charge des étudiants. « Je dépense environ 50 euros chaque année en matériel, comme des chaussures pour le kayak, des crampons pour le foot, un tapis pour la préparation physique… », énumère Emma.
Pour les étudiants en STAPS, ces dépenses sont bien souvent une surprise à l’arrivée en licence. « On ne nous a jamais prévenu qu’on devrait acheter tout ce matériel », témoigne Gabi.
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Des déplacements à la charge des étudiants
Une autre dépense non anticipée vient alourdir la facture des étudiants : les déplacements. « Certaines pratiques ne se font pas à l’université, le kayak par exemple, et le déplacement n’est pas pris en charge« , pointe Gabi.
À l’université des Antilles, la majorité des activités se font également à l’extérieur : danse, gym, rugby, course d’orientation, voile… « Il n’y a pas de bus mis en place par l’université, donc on doit le payer nous-même« , détaille Emma.
Selon Lily Rogier, « certains étudiants ratent des activités organisées en plein nature car ils n’ont pas de voiture, ou qu’ils ne peuvent pas payer l’essence« .
Ces frais sont ainsi un frein à la réussite de certains étudiants. Certains jeunes sont contraints de travailler à côté de leurs études. Or, selon la dernière étude de l’Observatoire de la vie étudiante, un emploi de plus de 18 heures par semaine multiplie par deux la probabilité d’échec à l’université.
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Des frais supplémentaires illégaux
Pour l’Anestaps, ces frais sont illégaux, puisque la seule dépense obligatoire au diplôme devrait être les frais d’inscription à l’université. « Si des frais supplémentaires sont demandés et spécifiés, ce sont des frais dits ‘annexes’ parfaitement légaux, ce qui n’est pas le cas pour les STAPS. Ces frais sont imposés à l’étudiant pour valider ou présenter une Unité d’Enseignement, sportive en l’occurrence », rappelle l’Anestaps.
L’association demande par conséquent la prise en charge de ces frais par les universités. En attendant, l’ANESTAPS tente de pallier cette situation avec des friperies où est prêté gratuitement et sous caution, du matériel de seconde main.
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Une solution cependant insuffisante et loin d’être déployée sur tout le territoire. « L’enjeu sur le long terme, c’est que les composantes des universités achètent le matériel et le prêtent aux étudiants. Mais cela demande un financement plus important des universités et un fléchage du budget vers les composantes STAPS », affirme Lily Rogier.
Le sous-financement des établissements et en particulier de la filière STAPS est dénoncé depuis 2017 par le mouvement « STAPS Oubliés » sur les réseaux sociaux. « C’est une filière qui a toujours été peu reconnue, peu financée et peu encadrée », pointe Lily Rogier.
En discussion avec le ministère de l’Enseignement supérieur, l’Anestaps a obtenu 5,4 millions d’euros en février 2022 pour financer des postes. Depuis, aucune solution n’a été apportée. « Le ministère nous dit qu’il ne peut pas se permettre de nous refaire une enveloppe », regrette Lily Rogier.
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Des frais illégaux en études de santé
À l’université, d’autres filières sont concernées par des coûts supplémentaires. C’est notamment le cas des étudiants en santé. Ils doivent en effet acquérir du matériel pédagogique coûteux (tenues, instruments médicaux, livres, etc.) et assurer leur déplacement entre les différents sites d’études ou vers les lieux de stage.
Ainsi, à la rentrée 2023, les étudiants en PASS (parcours spécifique accès santé) ont déboursé en moyenne 1.829 euros pour les frais spécifiques de rentrée (frais de scolarité, complémentaire santé, assurance logement, frais d’agence et matériel pédagogique). En L.AS (licence avec option « accès santé »), ces frais se sont élevés à 1.765 euros.
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