Voile intégral : les éléments du débat

Publié le 4 avr. 2011 à 10:35

Définition

Le voile, dont des musulmanes à travers le monde se couvrent la tête en totalité ou en partie, se décline en différentes versions et se retrouve dans de nombreuses traditions, bien au-delà de l’islam. Le port du voile pour les femmes est attesté depuis l’Antiquité, par exemple chez les Juifs, dans la Bible, et chez les Arabes, bien avant l’avènement de l’islam au VIIe siècle. Le hidjab est formé sur la racine arabe « hajaba », qui signifie « cacher », « dérober aux regards », « mettre une distance ». Ce voile cache les cheveux, les oreilles et le cou, ne laissant voir que l’ovale du visage. Promu par les Frères musulmans, il est souvent complété par une tunique ou un imperméable. Il s’est généralisé dans le monde musulman, remplaçant les tenues traditionnelles comme le « haïk » en Afrique du Nord, grande pièce de laine ou de coton qui dissimule les formes du corps et voile le visage. Le voile s’appelle aussi lithâm (cache-nez) ou encore khimâr, terme générique qui désigne tout ce qui couvre la tête: mantille, châle ou écharpe.

Le terme de «voile intégral» recouvre plusieurs tenues vestimentaires : le niqab (voile qui dissimule tout le corps, y compris le visage, à l’exception des yeux), le sitar (voile supplémentaire qui cache y compris les yeux que certaines femmes en jilbab font descendre le long du visage pour le couvrir) et la burqa (tenue qui recouvre intégralement le corps avec un mince grillage devant les yeux).

L’étude du ministère de l’Intérieur

Selon une étude réalisée entre août et décembre 2009 par le ministère de l’Intérieur, 1.900 femmes portent le voile intégral en France, dont 250 seraient établies à La Réunion et 20 à Mayotte. Si le phénomène touche l’ensemble du pays, hormis peut-être la Corse, l’Ile-de-France, Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur sont les régions principalement concernées . Le port du voile étant circonscrit aux zones urbanisées et concentré dans les cités sensibles des grandes agglomérations.

Ces 1.900 femmes sont relativement jeunes (la moitié d’entre elles est âgée de moins de 30 ans et l’immense majorité a moins de 40 ans ; les jeunes filles mineures ne représentent que 1 %), pour la plupart de nationalité française (les deux tiers seraient françaises et parmi elles la moitié appartiendrait aux deuxième et troisième générations issues de l’immigration) et un quart d’entre elles seraient des converties à l’islam, nées dans une famille de culture, de tradition ou de religion non musulmane.

Ce que prévoit la loi

Le projet de loi « interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public » a été définitivement adopté le 14 septembre 2010 par le Parlement. Très court, le texte compte sept articles. Le premier proclame que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». Par espace public, il faut comprendre « les lieux ouverts au public » (commerces, transports, parcs, cafés…) ou « affectés à un service public » (mairies, écoles, hôpitaux…), mais pas les véhicules circulant sur la voie publique. Les clientes des magasins de luxe venants des Emirats arabes unis et portant le niqab pour certaines d’entre elles se verront donc contraintes de retirer leur voile. En revanche les lieux de culte, qui font par définition partie de l’espace public ne sont pas concernés par l’interdiction, comme l’avait préconisé le Conseil constitutionnel.

L’interdiction n’entrera en vigueur qu’à partir du 11 avril 2011, soit six mois après la promulgation de la loi, après un délai de médiation et de pédagogie. Elle s’appliquera partout, tant en métropole qu’outre-mer.

Les exceptions : Quand la tenue destinée à dissimuler le visage est « prescrite » ou « autorisée » par des dispositions législatives ou réglementaires (port d’un casque pour les conducteurs de deux roues, nécessité de préserver l’anonymat de l’intéressé dans un procès…), pour « raisons de santé » (masques en cas d’épidémie, masques respiratoires, bandages, protections spécifiques contre les rayonnements solaires…), pour « motifs professionnels » (travaux de soudage ou de désamiantage, agents des forces de l’ordre…), pour « pratiques sportives » (escrime…), lors de « fêtes » (déguisements de carnaval, de père Noël), « manifestations artistiques » (cinéma, théâtre, cirque) et « manifestations traditionnelles » (processions, notamment religieuses)

Les sanctions pour le port du voile intégral : Les femmes concernées sont passibles d’une amende de 150 euros, à laquelle peut s’ajouter ou se substituer l’obligation d’accomplir un « stage de citoyenneté ». La verbalisation n’est donc pas automatique. Ce stage doit rappeler les valeurs républicaines. Il est réalisé en groupe, à l’occasion de sessions collectives, continues ou discontinues. Les forces de l’ordre ne peuvent contraindre par la force une femme portant le niqab ou la burqa à retirer son voile. Elles dressent un procès-verbal de constatation d’infraction transmis au parquet. Si la contrevenante refuse le contrôle de son identité, les forces de l’ordre peuvent la retenir (quatre heures maximum) sur place ou dans un local de police pour vérifier son identité

Les sanctions pour les personnes contraignant au port du voile intégral : Un nouveau délit de « dissimulation forcée du visage », puni d’un an d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende a été créé. Il vise les maris ou concubins (mais aussi toute autre personne) obligeant leurs compagnes (ou toute autre femme) « par menace, violence ou contrainte, abus de pouvoir ou abus d’autorité » à porter le voile intégral. Les peines sont doublées (deux ans de prison, 60.000 euros d’amende) lorsque la personne contrainte est mineure.

DOCUMENT  :

Un débat qui a tenu en haleine la classe politique pendant de longs mois

Juin 2008 : Le Conseil d’Etat refuse d’octroyer la nationalité française à une Marocaine musulmane qui se serait présentée en burqa lors d’entretiens avec les services sociaux et la police, en fustigeant «une pratique radicale de la religion incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française».

Juin 2009 : 58 élus, emmenés par le député PC André Gerin, demandent l’ouverture d’une enquête parlementaire sur la burqa, symbole «d’oppression» des femmes. Depuis quelques années, le député-maire communiste de Vénissieux, qui a été très sensibilisé au problème de l’islam radical par l’incarcération de deux jeunes de Vénissieux à Guantanamo, ne rate pas une occasion de pourfendre la montée de l’islamisme qui menacerait la République.

22 juin 2009 : Nicolas Sarkozy s’exprime devant le Congrès réuni à Versailles. La burqa «ne sera pas la bienvenue sur le territoire de la République», prévient le chef de l’Etat. Le voile intégral n’est «pas un problème religieux» mais «de liberté et de dignité de la femme. Ce n’est pas un signe religieux, c’est un signe d’asservissement, c’est un signe d’abaissement». Il se garde toutefois d’évoquer son interdiction, contrairement à plusieurs de ses ministres. «Le Parlement a choisi de se saisir de cette question, c’est la meilleure façon de procéder», se félicite-t-il. «Il faut qu’il y ait un débat et que tous les points de vue s’expriment.»

23 juin : L’Assemblée nationale crée une mission d’information composée de 32 députés (17 UMP, 11 socialistes, 2 Nouveau Centre et 2 membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) afin d’étudier l’ampleur du phénomène en France. Elle va procéder pendant six mois à une série d’auditions de maires, d’associations de défense des droits des femmes, de spécialistes de l’islam, de sociologues et de femmes voilées.

26 janvier 2010 : La mission parlementaire remet son rapport sans être parvenue à un consensus. André Gerin (PCF) et Eric Raoult (UMP), qui ont conduit cette mission, se sont heurtés à de nombreux écueils. Ils ont été court-circuités par le chef de file des députés UMP, Jean-François Copé, qui a réclamé sans attendre leurs conclusions une loi d’interdiction dans tout l’espace public, y compris dans la rue. Leur message a été brouillé par les dérapages du débat sur «l’identité nationale». Enfin, les socialistes ont finalement refusé de voter le rapport final. La mission recommande une résolution parlementaire (texte non contraignant) ainsi que des textes réglementaires et des lois sectorielles pour interdire le voile intégral dans les services publics et les transports publics. Elle émet, en revanche, de grosses réserves sur une loi générale.

31 janvier : François Fillon demande au Conseil d’Etat de lui soumettre, en vue d’un projet de loi, ses solutions juridiques «permettant de parvenir à une interdiction du voile intégral», «la plus large et effective possible».

24 mars : Nicolas Sarkozy confirme, lors d’une allocution télévisée au lendemain des élections régionales, l’intention du gouvernement de légiférer pour interdire le port de la burqa. «Le voile intégral est contraire à la dignité de la femme. La réponse, c’est l’interdiction. Le gouvernement déposera un projet de loi d’interdiction conforme aux principes généraux de notre droit», affirme-t-il.

30 mars : Dans un rapport remis à François Fillon, le Conseil d’Etat se prononce contre «une interdiction générale et absolue» du voile intégral, jugeant qu’elle «ne pourrait trouver aucun fondement juridique incontestable». Le Conseil préconise deux dispositifs : un pouvoir spécial de police pour les préfets portant interdiction de dissimulation du visage quand l’ordre public l’exige en fonction des circonstances locales ; et une interdiction systématique dans certains lieux (tribunaux, mairies, salles d’examen ou de concours…) lorsque «l’entrée et la circulation nécessitent des vérifications relatives à l’identité ou à l’âge».

21 avril : Nicolas Sarkozy tranche en faveur d’une interdiction générale du voile intégral en France, qui passera par un projet de loi et non une proposition de loi comme l’avait défendu Jean-François Copé. Le chef de file des députés UMP obtient néanmoins gain de cause sur le périmètre d’interdiction, qui concernera tout l’espace public, et non les seuls services publics. «Il faut faire évoluer la jurisprudence du Conseil constitutionnel, celle de la Cour européenne des droits de l’homme, pour faire face à une nouvelle question qui ne se posait pas il y a vingt ans […]. Nous pensons que c’est notre responsabilité de le faire», justifie François Fillon, qui mène une série de consultations avec les partis politiques et les autorités religieuses.

27 avril : Le débat s’embrase avec l’affaire d’une conductrice voilée verbalisée à Nantes par un motard pour «circulation dans des conditions non aisées».

11 mai : La proposition de résolution UMP qui dénonce le port du voile intégral comme «une pratique radicale contraire aux valeurs de la République» est votée à la quasi unanimité à l’Assemblée. Ce texte reste de nature purement symbolique, car la résolution parlementaire, utilisée pour la première fois depuis son introduction par la révision constitutionnelle de juillet 2008, n’a ni force de loi ni de pouvoir contraignant. Selon Jean-François Copé, chef de file des députés UMP : «La résolution, c’est pour expliquer ; la loi, c’est pour agir.»

Les socialistes dévoilent le contenu de leur propre proposition de loi qui limite l’interdiction du port de la burqa aux services publics et à certains commerces, prévoit une sanction sous forme de médiation sociale, et une amende en cas de refus de médiation.

19 mai : Michèle Alliot-Marie, ministre de la Justice, présente en Conseil des ministres le projet de loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public. 

13 juillet : vote du projet de loi à l’Assemblée nationale.

14 septembre : le Sénat adopte sans modification le texte.

7 octobre : le Conseil constitutionnel valide la loi. Une réserve d’interprétation est toutefois ajoutée : l’interdiction ne pourra s’appliquer dans les lieux de culte ouverts au publics.

11 avril 2011 : Entrée en vigueur de la loi.

Etat des lieux de la législation sur le voile intégral en Europe

Belgique : elle se prépare à interdire le voile intégral dans les services publics mais aussi dans la rue. Le projet de loi approuvé fin avril par la Chambre des députés doit maintenant être adopté par le Sénat

Danemark : le gouvernement a décidé en janvier 2010 de limiter le port de la burqa et du niqab dans l’espace public, mais sans l’interdire, laissant le soin aux écoles, à l’administration et aux entreprises de fixer des règles

Pays-Bas : plusieurs projets de loi concernant l’interdiction du port du voile intégral sont en préparation, notamment dans l’enseignement et la fonction publique

Espagne : après quelques initiatives locales, notamment en Catalogne, interdisant le voile intégral dans les édifices publics, le gouvernement envisage d’inclure dans une future loi sur la « liberté de religion » une mesure restreignant l’usage de la burqa dans les lieux publics

Italie : une loi de 1975, faisant partie des « dispositions de protection de l’ordre public », interdit de se couvrir complètement le visage dans les lieux publics (voile, casque de moto). Quelques maires de la Ligue du Nord ont interdit, localement, la burqa, le niqab ou la tenue de bain islamique (burkini). Le gouvernement est divisé sur l’opportunité d’une interdiction générale et le dossier n’est pas jugé prioritaire.

Allemagne : plusieurs Länder (Etats régionaux), dont trois des plus grands, interdisent le port du voile pour les enseignantes

Royaume-Uni : aucune loi n’interdit le port du voile intégral. Un parti anti-européen fait cependant campagne pour son bannissement et le ministère de l’Education a publié en 2007 des directives permettant aux directeurs d’établissements d’interdire le niqab

Suisse : le ministère de la Justice voudrait interdire le voile intégral au niveau cantonal dans les lieux publics, tout en envisageant un système d’exceptions pour les touristes musulmanes

Pour en savoir plus

Le rapport de la mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national

La proposition de résolution UMP

L’étude du Conseil d’Etat relative aux possibilités juridiques d’interdiction du port du voile intégral

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