Jean-Marie, est-ce que tu peux nous parler un peu de toi ? D’où te vient ta passion pour la voile ?
Je suis né à Concarneau, dans le Finistère, en Bretagne, en face des Glénans. C’est un endroit réputé et chargé d’histoire pour la voile et les bateaux de course. J’ai commencé la voile très tôt puisqu’à l’école maternelle déjà, on nous met sur l’eau. C’est un peu un rite de passage !
Mes parents avaient des bateaux avant que je sois né, donc dès le berceau je me suis retrouvé calé dans le fond du bateau. À 14 ans, je suis naturellement devenu moniteur de voile et à 15 ans, mes parents me donnaient les clés de leur bateau. Et dès qu’ils n’avaient pas besoin du bateau, je prenais la mer avec mes amis. Cela m’a permis de prendre de l’expérience et, très jeune, d’être autonome en voilier.
Après mes études, je suis retourné dans le monde du nautisme, mais plutôt en fabrication. J’ai travaillé chez Beneteau et Marsaudon Composites, qui faisaient des catamarans Catana à l’époque. Naviguer me manquait, j’ai donc repris mes études pour passer mon capitaine 200 en voile. Dès que je l’ai eu, j’ai acheté un voilier et j’ai hissé les voiles direction les Caraïbes. J’ai fait du charter et beaucoup de sorties à la journée, mais aussi du bateau moteur, du speedboat…
Juste avant le COVID, je travaillais pour Dream Yacht Charter et je réalisais notamment tous leurs rapatriements de bateaux et toutes les livraisons de bateaux neufs. Mon terrain de navigation s’étendait de Porto Rico au nord à Grenade au sud.
Tu reviens de deux transatlantiques à bord d’un Windelo, comment c’était ? Et comment comparerais-tu cette expérience avec une traversée sur un autre bateau ?
Ce qui est impressionnant, ce sont les vitesses. Sur un bateau de croisière classique, on navigue à environ 8 nœuds alors que sur un Windelo, quand on est à huit nœuds, on a l’impression d’être à l’arrêt. En 2001, j’avais ramené un bateau de Catherine Chabaud avec son préparateur. À l’époque, on hallucinait, avec 15 nœuds de vent, on naviguait à 12 nœuds. Avec le Windelo, j’avais l’impression de naviguer sur un bateau de croisière de luxe à la vitesse des bateaux de course d’il y a 25 ans. Ce qui est vraiment bluffant. Sur les Windelo, on peut dépasser les 250 milles nautiques par jour ! Et sur le retour nous avons mis moins de temps pour relier la Guadeloupe aux Açores, qu’à l’aller pour relier le Cap-Vert à la Guadeloupe ; ce qui était complètement paradoxal pour moi. La distance est quasiment la même mais au retour, nous sommes censé être au prés, et à l’aller, au portant. Naviguer plus rapidement avec le vent de face, j’avoue que c’était une très belle performance. En jouant un peu avec les réglages du Windelo, on arrive à ne pas trop être portant mais un peu sur le travers. On gagne alors de l’incidence et avec 10 nœuds de vent on naviguait à 10 nœuds de moyenne. Et ça, c’est quand même assez exceptionnel sur un bateau de croisière.
Comment s’est passée la vie à bord pendant la traversée ? Et comment as-tu vécu le fait d’être seulement deux à bord ?
Initialement, j’étais prêt à faire une traversée tout seul, mais pour des raisons de sécurité et d’assurance, ce n’était pas possible. Donc j’ai embarqué avec un ami. Il avait une petite expérience de matelot, mais surtout, c’est un bon cuisinier. Je me suis donc concentré sur la navigation et lui les repas. Donc, d’une certaine façon, côté navigation, j’ai fait la transatlantique seul, mais avec un équipier à bord, ce qui est très rassurant en cas de besoin et permet de ne pas gérer l’intendance du bateau. Un très bon deal je trouve, qui m’a vraiment permis de faire une transatlantique en mode course. D’où nos performances, quand tu es concentré uniquement sur la navigation !
Et côté confort, quand tu navigues à deux, tu as un flotteur chacun. Ça veut dire que tu as ta propre douche, tes toilettes et deux chambres chacun ! La vie est plus que zen. Sans oublier que le bateau est super bien équipé !
Qu’as-tu pensé du cockpit avant ?
Moi, j’adore. En navigation, il n’y a pas mieux. Tu n’as pas besoin d’être dehors, tu n’es jamais soumis aux éléments et tu peux avoir ta vie à bord. S’il y a quoi que ce soit, tu ouvres la porte vitrée et tu as la vision sur tout. On a presque l’impression d’être sur un bateau de course. Dans ce cockpit avant, tu peux gérer le bateau seul et ce, même en mode course en utilisant tes différentes voiles d’avant. Et le fait d’avoir des winches électriques, c’est quand même magique. Après une année sur le Windelo, jamais je repasserai sur un catamaran avec un flybridge ou avec deux barres extérieures. Quand tu passes 25 jours en mer, tu apprécies de ne pas être obligé de rester dehors, tu n’es plus mouillé ni exposé au vent. Sur d’autres catamarans ou bateaux, c’est la punition pour celui qui est à la barre et doit rester près des écoutes, etc. Sur le Windelo, tout est à proximité, et tu as une vision à 360° que les autres n’ont pas.
Quelles ont été les conditions sur votre transatlantique aller ?
On a eu des conditions très dures à l’aller. Quand nous sommes sorti de Gibraltar, nous pensions mettre le cap sur Madère mais la météo s’est compliquée. Nous nous sommes donc dérouté sur les Canaries, et nous sommes allé chercher un front au sud-ouest du Portugal, où avons eu plus de 40 nœuds établis pendant 4 heures. Puis nous avons eu une heure avec 50 nœuds établis, et 5 mètres de creux au près. Autant dire que le bateau est solide et que je l’ai bien éprouvé. Même dans ces conditions très dures c’est validé pour moi. Après quoi, nous avons tout le temps eu de grosses alizées entre 25 et 30 nœuds. Avec un gennaker entier et 2 ris dans la grand-voile, le bateau avançait très bien et était très équilibré.
Et pour la traversée retour ?
Au retour, c’était vraiment très bien. On a eu très peu de vent au-dessus de 10-15 nœuds réels et c’est là où, selon moi, le Windelo fonctionne le mieux. Nous avons eu beaucoup de journées à 220-250 milles nautiques par jour. Pour un bateau de croisière, c’est quand même exceptionnel. Passer les 200 milles par jour, signifie que c’est un bateau qui marche vraiment bien. Sur cette traversée retour nous avons même doublé un classe 40 de la Route du Rhum qui rentrait de Martinique. Ils étaient 4 coureurs à bord et nous leur prenions un nœud et demi en vitesse moyenne. Ils étaient vraiment en mode course, avec routeur et tout ce qui fallait. Nous nous étions juste avec Windy… je m’appuyais vraiment sur mon expérience à la voile, mon feeling avec ce catamaran et sur les nuages, etc. Même si ce n’était qu’un monocoque, c’est assez plaisant de se dire qu’on a mangé un bateau de la Route du Rhum.
On a traversé le Détroit de Gibraltar à la voile avec une vitesse moyenne de 12 nœuds, le tout au milieu des cargos qui sont eux limités à 12 nœuds lors de leur traversée sur ce passage. À 12.5 nœuds, on était donc plus rapide. En tant que marin, je n’y était pas habitué, mais c’était grisant !
Puis arriver en méditerranée, le beau temps était au rendez-vous, la navigation agréable, nous étions seuls avec les dauphins…
Je suis vraiment content de cette traversée.
C’était la première fois que tu naviguais avec une motorisation électrique, comment cela s’est passé pour toi ?
C’est une approche complètement à l’opposé des bateaux dits conventionnels. Précédemment, si les batteries étaient basses, je démarrais les moteurs. Sur le Windelo, c’est l’inverse. C’est déjà un peu paradoxal, puisqu’il faut aller à l’opposé de nos réflexes acquis depuis toujours. Mais une motorisation c’est appréciable, il n’y a ni bruit, ni odeurs. C’est un vrai avantage. Sans oublier que les moteurs électriques ont beaucoup de couple dès le début. Mais le but d’un voilier, d’un bateau sport, ce n’est pas de faire du moteur, mais d’être à la voile ! Surtout quand vous avez un voilier qui navigue très bien avec peu de vent. Et a bord du Windelo nous avons navigué 80, 90% du temps à la vitesse du vent. Ça incite clairement à ne pas utiliser le moteur.
Comment s’est passé la vie aux Antilles, notamment au mouillage ?
Dans les Antilles, nous étions tout le temps au mouillage. C’est les tropiques, il n’y avait aucun intérêt à mettre le bateau dans le port d’autant plus que nous étions complètement autonome en énergie. L’autre avantage est que le bateau a un faible tirant d’eau, ce qui nous permettait d’aller dans des endroits où personne n’allait. C’est exceptionnel d’avoir un tirant d’eau de 1.1 mètres pour un bateau de 16 mètres. Ce que nous avons généralement sur des bateaux de 40 pieds. C’est même moins que le Lagoon 380 qui a un tirant d’eau de 1.2 mètres.
En charter, quand tu as 6 à 8 personnes à bord, comment ça se passe ? Comment vivent-ils le bateau ?
Ils adorent. Quand tu es à bord, tu as vraiment l’impression d’être dans une villa. Les cabines avec ces grands vitrages d’angle, c’est magique. Tu es dans ton lit, tu te réveilles sous les tropiques entouré d’eau eau turquoise dès que tu ouvres le rideau… ça vaut toutes les villas du monde.
Les clients adorent les équipements à bord. Lave-vaisselle, lave-linge, four, plaques à induction… pour eux, c’est magique. Ils n’ont plus l’impression de faire du bateau comme on en faisait avant, même sur un bateau de 50 pieds. Ce qu’ils adorent aussi, c’est la terrasse extérieure à l’arrière qui est totalement flush, les enfants adorent sauter à l’eau depuis cet espace.
Sinon, en tant que skipper, ce qui est appréciable, c’est que vous avez une salle de bain par coque et non pas 4 cabines avec chacun sa salle d’eau ce qui moins d’intendance.
Si on passe sur un sujet un peu différent, comment s’est passé ton arrivée au chantier ?
Très bien. Tout était organisé avec Pierre et Stéphane. Dès mon arrivée, une place de port m’attendait pour les 3 jours de cette escale technique et nous avions prédéfini tout ce qu’il y avait à faire. Il me reste encore une journée à passer à Canet-en-Roussillon et presque tous les travaux sont traités. C’est un vrai plaisir de travailler avec des pros qui sont à l’écoute.
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