Partager la publication « TOWT : la marine marchande remet les voiles »
Deux voiliers opérationnels et bientôt six autres pour compléter la flotte. Depuis Le Havre, temple de l’import-export français et des bateaux cargos XXL, TOWT réinvente la marine marchande avec une solution 0 émission de gaz à effet de serre ou presque. Une chimère ? On pourrait le croire. Surtout quand Guillaume Le Grand, cofondateur de TOWT, rappelle que « la dernière formation voile marchande a disparu en 1958. » Pourtant, il a créé la TransOceanic Wind Transport en 2011 avec sa femme, Diana Mesa, directrice générale de la société. Depuis treize ans maintenant, ils œuvrent pour faire d’un rêve une réalité : décarboner le transport de marchandises.
À l’heure actuelle, cette filière – qui transporte 70 % des marchandises au niveau planétaire – génère à elle seule 3 % des émissions de gaz à effet de serre (les projections tablent sur 17 % en 2050). Et la marine marchande pèse pour 7 % de la consommation de pétrole. Chaque année, ce sont plus de 3 millions de conteneurs qui sont traités par an par le port du Havre, premier hub français pour l’import-export.
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Utiliser une énergie renouvelable infinie pour la marine marchande
« Nous sommes partis d’un constat : le vent au large abonde et le routage en mer est beaucoup plus prédictif depuis 10 ans, explique le fondateur. Face à un secteur qui peine encore à décarboner, nous apportons une solution de transport à la voile et en toute transparence. » Cela peut sembler contre-intuitif mais les voiliers-cargos offrent un temps de transport à la voile identique , voire moindre, qu’en cargo et les tarifs ne sont pas beaucoup plus élevés.
« Il n’existe pas d’industrie aussi énergivore qui puisse se prévaloir d’une décarbonation aussi radicale qu’avec notre solution. Selon les conditions météo, l’empreinte carbone du kilo par mile nautique peut être réduite de plus de 90 % par rapport à un voyage en cargo classique », ajoute Guillaume Le Grand. Dans les cales, du cacao, du café, des alcools, des vêtements, des produits cosmétiques…
Des voiliers qui peuvent embarquer 1 100 tonnes de marchandises
TOWT dessert les États-Unis, la Colombie, le Brésil, les Antilles… et bientôt la Méditerranée. « On peut transporter de tout et, avec le carbone qui change la donne en termes d’architecture des bateaux. On peut imaginer des voiliers de plus de 100 mètres pour le transport de marchandises. C’est notre objectif. » Dessinés par les chantiers Piriou à Concarneau, les bateaux sont ensuite construits au Vietnam.
Deux sont déjà en activité depuis cet été, l’Artemis et Anemos. Mesurant 81 mètres de long, 15 de large, ils ont chacun la capacité de transporter 1100 tonnes de marchandises. Grâce à un mât de 2 tonnes en carbone de 55 mètres de long et jusqu’à 2 200 m2 de voile, ils peuvent atteindre une vitesse de 10 nœuds et plus. Six autres bateaux sont en chantier. Le prochain prendra la mer dans 22 mois puis les suivants seront livrés tous les trois mois. Les suivants, actuellement sur la planche à dessin, feront 120 voire 180 mètres de long.
Réinvente l’école du transport à la voile
Le défi actuel est de recruter et de former des marins pour le renouveau de la marine marchande à voile. TOWT a embauché 28 marins salariés pour ses transatlantiques. « Ils ont tous un diplôme de la marine marchande française donc ils sont capables de faire aller un cargo de 15 nœuds marins à moteur d’un point A à un point B, explique Diana Mesa. Tout ce qui est au-dessus du pont n’existe pas dans la formation, même dans la réglementation. Pour nos bateaux, nous recrutons des anciens du Ponant, du Belem… et nous allons recréer une formation, avec un département interne dédié à cela. »
Ces voiliers cargos sont très sophistiqués. Outre trois logiciels de routage, tous les gréements sont motorisés. « Nous avons une voile qui fait 700 m2 de surface, une écoute tire de l’ordre de 150 tonnes, la gîte peut aller jusqu’à 15 degrés. Ce serait impossible à manipuler manuellement donc tout est mécanisé », ajoute-t-elle.
Un label Anemos pour faire toute la transparence sur le transport
Sur un voilier transportant 20 tonnes de café vert, la réduction des émissions de CO2 avoisine les 1100 kilos. C’est l’équivalent de 10 000 km parcourus en voiture. Pour pouvoir l’affirmer, TOWT a créé la certification Anemos (vent, en grec ancien). C’est le premier – et seul à l’heure actuelle – label de transport au monde.
Concrètement, une étiquette est apposée sur chaque produit transporté avec un numéro du voyage. Il suffit de se rendre sur le site de TOWT pour découvrir la déclaration des émissions de dioxyde de carbone, le parcours réel du bateau, etc. Un vrai voyage qui donnera encore plus de saveur à la dégustation de son café.
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